Ah, ces vieux grincheux !
Je n'avais pas prévu de rédiger un billet aujourd'hui, pensant plutôt travailler sur mon PowerPoint... mais la lecture d'un billet de Soene m'a fait réagir. Il y est question d'un texte écrit par Bernard Pivot sur son rapport à la vieillesse.
Le premier paragraphe est vraiment bien senti. Joliment tourné, pêchu, lucide... il m'a beaucoup plu.
La suite en revanche m'a fait bondir : il nous raconte comment il a repris une jeune fille qui lui laissait sa place dans un transport en commun, sous forme de taquinerie à ses dires, mais moi je doute que la jeune fille ne réitère jamais sa proposition de céder sa place, même s'il a terminé en la remerciant, et c'est bien dommage.
Je sais pas, il y a pourtant des façons beaucoup plus élégantes de répondre, au hasard :
"Merci beaucoup, mademoiselle, mais si je prends votre place, tout le monde va croire que je suis vieux, or vous semblez être la seule à l'avoir remarqué, je me dis que si je m'asseois, je vais perdre l'illusion de jeunesse qu'ils me donnent..."
"Ah ! je vais décliner votre aimable proposition, mademoiselle, parce que le respect que vous montrez à vos ainés vous fait mériter votre place assise. La prochaine fois, en revanche, je serai ravis d'accepter ! "
"C'est très aimable à vous, mais je m'entraine à garder le pied marin, à rester debout contre accélérations virages et coups de frein... c'est mon sport quotidien, moins fatiguant que le rameur ou les haltères"
Que sais-je...
C'est un sujet que j'avais abordé, à l'université, avec mes jeunes camarades de promotion, après qu'un jeune homme m'ait cédé sa place dans le tram bondé (ce que j'avais accepté avec un grand sourire en l'inondant de remerciements) : plusieurs m'avaient dit qu'elles ne proposaient plus leur place à qui que ce soit après s'être fait rembarrer par des personnes indignées qu'on les prenne pour des vieilles (les mêmes, sans doute, qui râlent sur cette jeunesse mal éduquée ? ^^)... pour moi c'est de l'orgueil imbécile, qui joue contre l'image des vieux.
Car quoi ! pour les vingtenaires, après trente ans sont des terres obscures et sans vie où tout n'est que sérieux, ennui et déliquescence, il faut s'en souvenir (qui ne s'en souvient pas est sans doute déjà bien vieux ^^) pour ne pas les juger trop sévèrement sur la vision qu'ils ont de nous.
Non, pour un jeune, la génération de ses parents, et a fortiori celles d'après, ce n'est plus jeune. C'est vieux. Et puis c'est tout. Et au lieu de tourner notre regard vers eux en les suppliant de continuer à nous considérer comme des leurs, ce qui est tristement pathétique, nous ferions mieux de réinventer le vieux, de faire évoluer son image vers un truc plus sympa, non pas uniquement axé sur les pertes, un truc qui donne envie, sinon de vieillir, du moins de ne plus se lamenter de prendre de l'âge.
Parce que faut pas croire : acculer un jeune, même par taquinerie, comme l'a fait monsieur Pivot, ne sert à rien qu'à leur donner une image négative de l'âge. D'accord, on a des rides, des cheveux blancs, des articulations capricieuses, des trous de mémoire, que sais-je, mais il ne tient qu'à nous de ne pas ajouter à la liste : grincheux, râleur, orgueilleux. De mon expérience, et paradoxalement, c'est quand j'ai commencé à plaisanter sur mon âge et l'état de mes articulations que certaines de mes camarades ont commencé à oublier l'écart générationnel.
Je rêve d'un âge qui s'assume !
Bon, pour la forme, je remets ce VIEUX dessin... ^^